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Le développement de l'âme

Alfred Percy Sinnett
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CHAPITRE XI :
LES FRÈRES AÎNÉS DE l'HUMANITÉ (1/3)

Nous n'aurions jamais été en position d'acquérir la connaissance que nous possédons aujourd'hui des grandes chaînes d'évolution de ce système planétaire, si quelques individualités de la famille humaine n'avaient pu devancer le cours normal de l'évolution, et acquérir prématurément les facultés spirituelles inhérentes à une évolution supérieure, facultés qui ne seront accessibles à la totalité de notre race que dans un avenir très éloigné. Nous allons chercher à mieux comprendre ce qu'il faut entendre par devancer l'évolution normale ; puis nous approfondirons en détail certaines considérations qui démontrent que ceux d'entre nous qui pourraient accomplir cette œuvre n'iraient en aucune façon à l'encontre du plan évolutif normal. Ils se proposent, au contraire, d'unir le plus tôt possible leurs efforts individuels, si faibles soient-ils au début, au travail si grandiose de la nature, d'accomplir pour ainsi dire, en ce qui nous concerne spécialement, les desseins de la Providence, et de contribuer à la réalisation du programme qui concerne la majorité de l'humanité ; si cette façon d'agir est comprise sous son véritable jour, on remarquera qu'elle s'harmonise avec le but normal de l'évolution. Car l'enseignement, qui permet à ceux qui le professent d'accélérer le cours de leur évolution, est en somme accessible également à tous et bien que tout homme puisse toujours choisir soit d'entraîner ses forces pour aider l'évolution spirituelle de l'humanité entière, soit au contraire de les exercer pour l'entraver, il est mathématiquement certain que, dans l'ensemble des individualités humaines, quelques-unes d'entre elles comprendront le but élevé de leur destinée et rempliront le rôle de précurseur, absolument nécessaire à la prospérité de l'œuvre de ce monde.

      En revoyant le cours de l'histoire humaine depuis quelques mille siècles, nous remarquerons que, dès les temps les plus reculés, quelques rares personnalités surent prévoir ce qui les attendait et, se servant de la lumière intérieure vivifiée par leurs propres aspirations, travaillèrent à leur développement et en vinrent à occuper dans la nature un sommet d'où ils pouvaient contempler le cours ordinaire de l'évolution humaine, tel que nous l'avons décrit dans les chapitres précédents. Les facultés humaines ont de telles potentialités, qu'à certains stades de son développement, l'homme incarné acquiert une vision, une clairvoyance même qui pénètre tous les plans de la nature où s'accomplit l'évolution normale déjà décrite ; elles s'étendent même bien au delà, jusqu'à des degrés supérieurs de conscience spirituelle. D'un regard jeté en arrière cet homme peut alors observer l'œuvre accomplie jusqu'ici ; la destinée et le but final du progrès humain ne lui sont pas moins clairement visibles. Rien de ce qui concerne le passé historique de cette terre, sans compter celui des autres globes reliés à notre chaîne planétaire, ne peut échapper à la vision d'une âme qui, dans son corps ou hors de son corps, peut fonctionner sur le plan dévakhanique, sans parler même des royaumes, plus sublimes encore, auxquels nous avons fait allusion. Il existe des méthodes qui permettent à l'homme incarné d'activer son évolution spirituelle jusqu'à obtenir la vision de ces plans ; et comme nous avons, peu à peu, préparé le terrain pour rendre de nouvelles explications intelligibles, il nous sera possible d'exposer, avec une exactitude suffisante, le moyen d'atteindre à de telles hauteurs et de montrer quelques-unes des responsabilités encourues par l'acquisition de ce développement anormal. Notre sujet n'aurait pu être compris s'il n'avait été précédé d'un examen raisonné de l'ensemble du système évolutif auquel nous appartenons. Cela nous permet, à la fois, de comprendre la grandeur de l'œuvre accomplie jusqu'à ce jour, et la grandeur égale de celle qui nous est réservée. Nous ne pourrons apprécier correctement la nature de l'évolution spirituelle prématurée, ni comprendre la place qu'occupent dans la nature les représentants les plus avancés de notre humanité, si nous perdons de vue l'ensemble de la chaîne manvantarique.

      Il existe aujourd'hui encore des êtres, vivant sur terre, appartenant réellement à notre famille humaine, et qui ont déjà atteint ce summum d'élévation que j'ai décrit comme le couronnement de notre évolution. S'il fallait compter, en supposant que cela fût possible, le nombre d'existences à traverser dans l'évolution normale, de l'époque actuelle à l'expiration de la septième ronde – chacune de ces vies séparées des autres par de longues périodes de repos spirituel et quelquefois par des expériences malheureusement très peu reposantes – nous arriverions à des chiffres à peine concevables en imagination. Quoique le point tournant du manvantara ne soit franchi que depuis un nombre d'années relativement faible, nous trouvons quelques uns des ascensionnistes les plus déterminés occupant déjà les sublimes sommets de notre système. Ceux qui peuvent réellement apprécier la grandeur de la tâche accomplie s'étonneront toujours qu'il soit possible d'atteindre ces hauteurs dans une brève série d'existences, même si ce noble but est poursuivi, dans chacune d'elles, avec une ardeur incessante. Quelquefois, les personnes qui entendent parler des capacités et des pouvoirs anormaux possédés par ceux qui ont devancé leurs compagnons, sont portées à croire, dans leur ignorance de ce que signifie cet avancement, qu'un effort sérieux, exercé dans cette direction, suffirait à réaliser leurs espérances, et qu'elles pourraient obtenir leurs diplômes dans la science occulte avec aussi peu de difficulté qu'elles en éprouveraient à le faire dans une école universitaire. Tout homme qui, par la pensée, aura compris la véritable signification de la haute initiation et la véritable place occupée dans la nature par ceux que nous appelons les grands Adeptes, appréciera l'absurdité de cette supposition. L'intervalle évolutif, qui sépare ces Adeptes de l'humanité ordinaire, peut être évalué à toute la deuxième partie de notre manvantara. Le processus d'initiation, conduisant à l'Adeptat supérieur, est en réalité un abrégé de cette deuxième moitié de manvantara : il permet d'acquérir en une courte série de trois, quatre ou six existences la connaissance, les facultés et la grandeur morale pour lesquelles la Nature nous a accordé, dans l'avenir, un laps de temps incommensurable. Nous examinerons plus minutieusement dans la suite quels sont les efforts nécessaires pour accomplir les premiers pas dans cette voie, mais il faut concevoir une idée générale de l'ensemble avant de pouvoir fructueusement en examiner les détails ; et l'idée principale que j'ai voulu faire ressortir dans mon exposé est celle-ci : Le point culminant de l'évolution comporte une corrélation intime entre le développement complet de l'individu et l'état de conscience qui lui donne, sur ces plans élevés, la mesure entière de la volonté dont l'Univers est la manifestation.

      Il faut avouer cependant que des possibilités d'évolution accélérée existent pour certains hommes dont les aspirations spirituelles sont limitées et qui entrent dans la voie du développement dans un but purement égoïste. Ces hommes espèrent, par là, acquérir un surcroît de puissance, et dans les grandes potentialités qui s'éveillent en eux ils entrevoient un moyen d'arracher à la Divinité quelques-uns de ses trésors, pour les faire servir ensuite au seul triomphe de leur vanité personnelle, et cela pendant une période donnée, seule éternité dont ils aient souci (32). Celui qui entre dans le sentier du développement occulte inspiré par de tels motifs court très probablement au-devant d'un échec terrible ; il sera rejeté violemment dans la voie normale où il endurera de longues et horribles souffrances. Si pourtant, au prix de dangers indescriptibles, ce représentant de l'avancement égoïste réussissait (en supposant la réussite possible), ce succès serait déterminé, dès le début, par un état d'âmo incompatible avec le bonheur. Au surplus, un développement spirituel aussi pernicieux ne pourrait certainement pas dépasser les limites de la période d'activité de notre planète. Ceux, au contraire, qui choisissent le sentier du service, le service de l'Idéal Divin, peuvent déjà atteindre, en ce manvantara actuel, le point culminant de l'évolution ; et ce point, loin d'être pour eux le but final, les conduira vers des béatitudes spirituelles que la pensée humaine, à son stade actuel, est hors d'état d'approfondir.

      Ces altitudes leur ouvrent un horizon toujours infini, et ils peuvent nous communiquer quelques-unes de leurs impressions. C'est ainsi que, sans arriver à la conception de quelques états de conscience qui dépassent ceux de notre système, nous pouvons cependant pressentir, avec quelque certitude, la possibilité, pour l'humanité perfectionnée, d'un développement ultérieur, et de certaines conditions d'existence où l'individualité humaine s'unira aux hiérarchies gouvernant le Cosmos. Mais quittons, pour l'instant, ces considérations, et celles des grandes énergies spirituelles employées au mal, et passons aux occasions qui nous sont ofi'ertes d'accé lérer légitimement notre évolution en suivant le sentier de l'Adeptat. Ce sentier, ne l'oublions pas, a pour objet d'abréger les spirales interminables de la grande voie que l'humanité devra parcourir pendant la deuxième moitié du manvantara (33). L'accès de ce sentier n'est devenu possible qu'après la fin de la première moitié ; car le manvantara entier comporte un double processus – l'involution de l'esprit dans la matière, puis son évolution hors de la matière. Pendant la première moitié du manvantara effectue la descente dans la manifestation, et pendant la seconde, l'ascension hors de cette manifestation. Nous nous perdrions dans des hypothèses métaphysiques sans nombres en cherchant à comprendre quel profit l'esprit peut retirer de sa manifestation matérielle. Cet esprit étant la potentialité de toutes choses, y compris la manifestation physique, comment pourrait-il s'accroître, puisqu'il contient déjà tout en lui-même ? Ce problème deviendra peut-être plus intelligible lorsque nous aurons acquis une connaissance approfondie du système solaire ; les mystères du grand tout dont ce système solaire n'est qu'une très faible partie rentreront, peut-être alors, dans le champ de nos capacités mentales. Mais, pour le présent, toutes les hypothèses ne démontreraient que notre incompétence à expliquer les mystères qui nous touchent de plus près. La théorie de notre système planétaire, cependant, est intelligible. Les énergies spirituelles involuent dans la matière, puis elles en évoluent ; et cette évolution, qu'elle soit rapide ou lente, ne peut commencer avant l'expiration du processus d'involution. On ne saurait donc en entreprendre l'accélération qu'après avoir dépassé le point tournant du manvantara, puisque l'évolution, elle-même, ne commence qu'à ce point.

      Pendant le manvantara précédent, les entités déjà différenciées de la famille humaine se trouvaient, selon leur développement, plus ou moins capables de comprendre le vrai but de l'existence.

      Aussi avons-nous vu que celles d'entre elles, qui profitèrent le mieux de leurs expériences, ne firent leur apparition sur notre chaîne que vers le milieu de la période mondiale. Elles s'incarnèrent alors pour devenir les frères aînés de notre race. Beaucoup d'entre ceux-ci remplirent avec zèle, dans ce manvantara, les obligations de leur existence ; ils formèrent ainsi l'avant-garde de notre humanité et profiteront avec avantage de l'enseignement de ces êtres plus avancés encore, qui, issus d'une autre évolution, furent les premiers guides de notre famille humaine. Ainsi préparés, ils entrèrent dans le sentier qui s'ouvrait alors à l'humanité et qui les conduisit rapidement aux niveaux les plus élevés de la conscience et du pouvoir. La rapidité extraordinaire de leur progrès n'a rien qui puisse blesser le raisonnement, surtout si l'on réfléchit à la simplicité du principe qui sert de base au développement occulte.

      L'unité de la conscience spirituelle est la première idée à saisir ; puis le sentiment illusoire de la différenciation qui en est la déduction logique. La première de ces idées éveille en nous un grand désir de réaliser cette unité de conscience, et par conséquent de nous identifier à l'Idée divine exprimée par le système auquel nous appartenons. La deuxième pensée, lorsqu'on s'en pénètre bien, détruit entièrement l'égoïsme. Ce vice caractéristique déraciné, la nature humaine n'offre plus aucune prise au mal, et commence alors à développer ses potentialités pour le bien infini, potentialités qui comprennent le savoir illimité. L'obstacle qui arrête la plupart d'entre nous, c'est que nous ne pouvons réaliser l'unité de la conscience spirituelle ; nous n'arrivons qu'à dissiper l'idée contraire, c'est-à-dire un égoïsme affaibli. Mais lorsqu'un homme est absolument pénétré de ces deux idées, il n'attache plus à ses sensations personnelles une importance plus grande qu'à celles de tout autre individu, car il comprend qu'elles ne sont toutes deux que des manifestations individualisées du même esprit agissant en lui ; et, après deux ou trois existences employées à dissiper les forces du mal engendrées par ses vies passées, il s'élèvera au niveau des Adeptes, bien rapidement comparativement à la durée d'un manvantara. Si, d'ailleurs, sa conscience est bien pénétrée de notre idée fondamentale, cet homme n'aspirera pas à s'élever au rang d'Adepte avant d'avoir accompli ce travail préliminaire.


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(32)  « Ils ont accentué leur personnalité (5ème principe) en lui sacrifiant leur spiritualité qui est le 6ème principe, l'étincelle divine en nous. Or, quand la personnalité s'évanouit, conséquence nécessaire lorsque, dans le cours des temps, toute la nature se spiritualisera, ils perdront tout et revenant en arrière, auront à regravir l'échelle à partir du premier échelon. C'est la la damnation éternelle des méchants, l'annihilation dont il est souvent parlé dans les traités occultes. Cela ne signifie pas un retour au néant absolu, mais une perte de tous les souvenirs qui s'amassent autour d'une individualité depuis le début de sa course cyclique. »
      Traduit de Man: Fragments of forgotten History, page 86.

(33)  Spirales interminables si magistralement et si poétiquement exposées dans l'introduction de Vers le Temple, de Mme Annie Besant. N. D. T.




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